ASAGUMO: L'ARAIGNÉE GÉANTE ANGLAISE

Avec le rover lunaire Asagumo, la Grande Bretagne pourrait bientôt inscrire son nom dans l’histoire de l’exploration lunaire en devenant la prochaine nation à envoyer un robot d’exploration sur la Lune d’ici 2021. L’objectif: cartographier les réseaux de tunnels lunaires formés par d’anciennes coulées de lave à l’aide d’un robot-araignée.

Avec le rover lunaire Asagumo, la Grande Bretagne pourrait bientôt inscrire son nom dans l’histoire de l’exploration lunaire en devenant la prochaine nation à envoyer un robot d’exploration sur la Lune d’ici 2021. L’objectif: cartographier les réseaux de tunnels lunaires formés par d’anciennes coulées de lave à l’aide d’un robot-araignée.

Asagumo: une "araignée" de 1300 grammes

Si vous avez des tendances arachnophobes, le rover construit par la société britannique Spacebit ne sera peut être pas votre meilleur ami. En effet, le robot se présente sous la forme d’un cube de 10 centimètres de côtés similaire aux éléments de base des nanosatellites, animé par quatre jambes mécaniques qui lui donnent une allure d’araignée géante. Nommé Asagumo, en référence au proverbe japonais selon lequel une araignée porte bonheur de bon matin, le “cuberover” imaginé par la compagnie anglaise pèse 1300 grammes, et sera le plus petit rover au monde à se poser sur notre satellite naturel. 

Pavlo Tanasyuk présente un prototype du rover Asagumo
Pavlo Tanasyuk présente un prototype du rover Asagumo. Si les arachnides ont en réalité huit pattes, son architecture lui donne une allure d'araignée-robot ©Spacebit

"Ce rover offre un potentiel pour des missions lunaires low-cost. C'est beaucoup moins cher que la concurrence déjà présente sur le marché"
Pavlo Tanasyuk
Pavlo Tanasyuk
Spacebit CEO
Asagumo, le rover de Spacebit
Asagumo, le rover de Spacebit ©Spacebit

Asagumo: un rover à quatre pattes

Sans roues ni chenilles, sa petite taille et sa configuration doivent lui permettre d’explorer des zones normalement difficiles d’accès pour les rovers classiques, tout en réduisant les coûts de construction, comme l’explique le CEO de Spacebit.

Explorer d'anciennes coulées de lave

En décembre 2019, la société Spacebit se rendait au Japon, à une quinzaine de kilomètres au sud-est du Mont Fuji, pour tester un premier prototype dans des caves naturelles similaires à celles que l’on retrouvent sur la Lune (cf. carte ci-dessous). En effet, les premiers indices prouvant l’existence de ces structures souterraines y ont été découverts grâce à SELENE, une sonde orbitale japonaise, mieux connue sous le nom de Kaguya, elle a notamment étudié la géologie et l’histoire de la formation de notre satellite naturel. Plus récemment, c’est le Lunar Reconnaissance Orbiter (LRO), lancé en 2009 par la NASA, qui a permis d’identifier les contours d’un tunnel partiellement effondré de 50 kilomètres de long.

Photo satellite d'un tunnel de lave sur la Lune
Photo d'un tunnel de lave partiellement effondré, prise par le satellite Lunar Reconnaissance Orbiter ©NASA

"C'est important d'explorer les tunnels lunaires pour connaître l'environnement que nous avons là-bas, afin que les humains puissent potentiellement les aménager pour y vivre lorsqu'ils retournent sur la Lune."
Pavlo Tanasyuk
Pavlo Tanasyuk
Spacebit CEO
Modèle d'abri lunaire imprimé en 3D
L'ESA envisage déjà l'utilisation du régolithe lunaire assemblé par une imprimante 3D pour abriter des modules d'habitation pressurisés gonflables

Protéger nos astronautes

Les géologues pensent que ces tunnels formés lors du refroidissement de coulées de lave sont probablement plus larges sur notre satellite, grâce à la faible gravité lunaire et à l’absence d’atmosphère. Comme le rappelle le CEO de Spacebit, ces formations géologiques pourraient permettre de protéger nos astronautes des dangers qui règnent à la surface de notre satellite, notamment dans le cadre de la mission Artemis.

Pour rappel, sans la protection d’une atmosphère ou d’un champ magnétique, la surface lunaire est un milieu particulièrement hostile pour l’Homme, même protégé d’une combinaison spatiale: températures extrêmes, chute de météorites, rayonnement solaire, autant de bonnes raisons pour établir une base lunaire souterraine. L’agence spatiale européenne travaille d’ailleurs déjà sur l’exploitation du régolithe lunaire comme on l’a vu dans un article précédent.

Le vaisseau Peregrine amènera Asagumo sur la Lune

Pour sa mise en service simplement baptisée “Mission One”, Asagumo fera partie des 14 charges utiles scientifiques déposées à la surface lunaire par le vaisseau Peregrine de l’entreprise américaine Astrobotics. La construction de l’engin a été initiée dans le cadre du Commercial Lunar Payload Services (CLPS), un appel d’offre de la NASA pour développer de nouveaux atterrisseurs lunaires.

Maquette de l'atterrisseur développé par la compagnie Astrobotic
Maquette de l'atterrisseur développé par la compagnie Astrobotic, qui propose de déposer pas moins de 14 charges utiles dans la plaine basaltique de Lacus Mortis.
Photo de la région du Lacus Mortis
Photo de la région de Lacus Mortis. On y trouve des rainures (dépressions étroites ici appelées Rimae Bürg) censées cacher les fameux tunnels de lave qui seront peut être explorés par le rover lunaire Asagumo pendant la Mission One.

Première mission test prévue avant la fin 2021

Cette mission de démonstration prévue pour la fin de l’année 2021, permettra au petit robot équipé de panneaux solaires d’explorer son site d’alunissage pendant une dizaine de jours avant de geler dans le froid de la nuit lunaire. Pour cette première sortie, Asagumo doit s’aventurer dans un rayon de 10 mètres autour de son atterrisseur, une distance suffisante pour permettre aux ingénieurs de Spacebit de tester la caméra HD et le laser Lidar (utilisé comme un scanner 3D) qui équipent le robot.

La société Spacebit envisage déjà une deuxième mission à l’horizon 2023, pour déposer sur la Lune un rover à roues qui servira de “vaisseau mère”, abritant jusqu’à quatre robots Asagumo, les protégeant du froid pendant les longues nuits lunaires. Cette base mobile prolongera donc la durée des missions d’exploration tout en servant d’antenne pour relayer les données scientifiques vers la Terre, une stratégie qui devrait permettre de commencer la cartographie 3D des réseaux de tunnels de lave lors d’une troisième mission prévue d’ici 2026.

Pierre-Henri Le Besnerais

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