James-Webb: Le plus grand télescope spatial jamais construit

Trois décennies après le lancement du télescope Hubble, l’observatoire James-Webb va bientôt révolutionner l’astronomie moderne en observant des galaxies vieilles de 13,5 milliards d’années. Prévu pour être lancé d’ici la fin de l’année, le plus grand et le plus complexe télescope spatial jamais construit sera équipé de technologies nouvelle génération pour étudier la naissance et la formation des toutes premières étoiles de notre univers.

James-Webb: 25 ans de développement
L'équipe du projet JWST du centre Goddard de la NASA devant une maquette à l'échelle 1 du télescope (septembre 2005) ©NASA/Goddard Space Flight Center/Pat Izzo
Le télescope spatial Hubble
Le développement du télescope Hubble, qui tient son nom de l'astronome Edwin Hubble, démarre au début des années 1970. Il décollera 20 ans plus tard à bord de la navette spatiale américaine Discovery. Initialement placé à 590 km d'altitude, il orbite aujourd'hui à 540 km au-dessus de la Terre. ©NASA

James-Webb: 25 ans de développement

Le télescope James-Webb (JWT) est un observatoire spatial développé conjointement par la NASA, l’ESA et l’agence spatiale canadienne. Nommé d’après le second administrateur de la NASA James Edwin Webb, un total de vingt pays participent au projet lancé en 1996. 

Le futur télescope a été optimisé pour l’observation dans l’infrarouge afin de pouvoir compléter et approfondir les découvertes du télescope Hubble. Pour rappel, perché à 540 kilomètres d’altitude, Hubble observe le cosmos dans l’ultraviolet et la lumière visible depuis sa mise en orbite en 1990.

James-Webb: 25 ans de développement
L'équipe du projet JWST du centre Goddard de la NASA devant une maquette à l'échelle 1 du télescope (septembre 2005) ©NASA/Goddard Space Flight Center/Pat Izzo
“Sa sensibilité est extraordinaire. Si vous étiez un bourdon à la surface de la Lune, le James-Webb pourrait vous voir depuis la Terre”
John C. Mayer
Astrophysicien à la NASA

Une précision inégalée

Contrairement à Hubble, le télescope spatial de James-Webb sera positionné au point de Lagrange L2 du système Terre-Soleil, situé à 1,5 millions de kilomètres de la Terre. Avec ses 6,5 mètres de diamètre, son miroir primaire aura une surface six fois plus large et le James-Webb sera environ 100 fois plus puissant que son prédécesseur. 

Afin d’optimiser le fonctionnement de ses instruments dédiés à l’observation de l’univers dans l’infrarouge proche et moyen (0,6–28 micromètres), le futur observatoire spatial sera notamment refroidi de manière passive par un immense bouclier thermique.

Position du télescope James-Webb au point de Lagrange L2
Sur ce schéma (où les distances ne sont pas à l'échelle), la future position du télescope James-Webb est représentée dans le système Terre-Soleil. Il sera placé en orbite autour du point de Lagrange L2, à 1,5 million de kilomètres de la Terre, soit un centième de la distance Terre-Soleil. ©NASA
Comparaison James-Webb et Hubble
Comparaison entre le miroir primaire du James-Webb (segmenté en 18 miroirs de 1,3m pour un poids de seulement 20 kg chacun) et le miroir primaire du télescope Hubble (818 kg pour 2,4m de diamètre) ©NASA/Goddard Media Studios

Le long voyage du télescope JAMES-WEBB

Un lancement à bord d'Ariane 5

Prévu pour être lancé à bord d’une fusée Ariane 5, les composants du JWT présentent donc la particularité d’être pliés pour rentrer dans la coiffe de cinq mètres de large du lanceur européen

Après son départ depuis le centre spatial de Kourou, en Guyane française, la mise en fonction du télescope James-Webb se fera en plusieurs étapes, en commençant par le déploiement de son antenne et des panneaux solaires nécessaires pour alimenter ses systèmes électriques.

Décollage d'Ariane 5
Une fusée Ariane 5 ECA décolle du port spatial européen de Kourou, en Guyane française, le 25 juillet 2013. A son bord, le satellite de télécommunications européen Alphasat. ©ESA/CNES/ARIANESPACE-Optique Photo Video du CSG

Comment déployer un origami de 6 tonnes?

Au cinquième jour de son voyage, l’observatoire déploie son large bouclier thermique composé de cinq losanges de 12 mètres de largeur sur 22 de longueur. Constitué de Kapton, une couche de polymère isolant aussi fine qu’un cheveu, le parasol géant sera déployé et tendu par un système de câbles et de tiges télescopiques. 

Séparés par ce bouclier, la plate-forme accueillant les panneaux solaires et les éléments de propulsion sera exposée au soleil, tandis que la charge utile du télescope sera maintenue en permanence à l’ombre.

Schéma des composants du James-Webb Telescope (JWT)
La plateforme est située du côté éclairé du pare-soleil (E) à l'opposé de l'ensemble optique du télescope (F). Elle comprend notamment des panneaux solaires (B), une antenne grand gain (C), des viseurs d'étoiles (D), des radiateurs permettant de dissiper la chaleur dégagée par l'électronique (E). Le panneau (A) permet de stabiliser l'engin spatial. ©NASA

Un immense miroir primaire

Alors qu’il se trouve à presque un million de kilomètres de la Terre, le JWT déploie son réflecteur secondaire avant de réunir les trois parties de son miroir primaire segmenté. Constitué de 18 hexagones de 1,3 mètre de large, les segments sont composés d’un millimètre de béryllium recouvert d’une fine couche d’or pour réfléchir le rouge du spectre visible et l’infrarouge invisible à nos yeux.

Les alvéoles dorées de ce puzzle géant sont ensuite minutieusement alignées à l’aide de micromoteurs pour former une surface parfaitement lisse de 25 mètres carrés. Trente jours après le départ de la mission, le télescope sera alors complètement déployé et se placera en orbite autour du point de Lagrange L2.

Inspection d'un miroir du futur JWT
Des techniciens inspectent les finitions d'un des éléments du miroir primaire. Protégée par une couche de verre, les miroirs du JWT sont tous recouverts d'une fine couche de 100 nm d'or (48 grammes au total). ©NASA Goddard/Chris Gunn
Sur cette photo, les instruments scientifiques et le miroir du télescope JWT sortent d'une chambre d’essai sous vide après avoir passé environ 100 jours exposés à des températures cryogéniques dans un environnement similaire au vide spatial. ©NASA/Chris Gunn

JAMES-WEBB: le déroulement de sa mission

Encore six mois de tests

Il faudra patienter encore plusieurs semaines pour que le bouclier multi-couches du JWT n’abaisse suffisamment la température des instruments du télescope. Une fois ses capteurs refroidis à -240°c, les équipes scientifiques pourront étalonner les trois caméras infrarouges et le spectromètre embarqués, une étape d’étalonnage qui durera environ six mois. 

De la taille d’un terrain de tennis, le bouclier géant de l’appareil permet donc une économie significative des réserves de fluide cryogénique embarqués, prolongeant ainsi la durée de mission du futur observatoire spatial.

Comparaison du JWT avec un terrain de tennis
Avec ses 22 mètres de long pour 12 de large, le bouclier du JWT mesure près de la moitié d'un Boeing 737 et ses dimensions sont équivalentes à un terrain de tennis. ©Illustration NASA
Le bouclier thermique déployé lors de tests en 2014. ©Chris Gunn - NASA Goddard Space Flight Center

Quelles missions pour le James-Webb?

Initialement prévu pour fonctionner pendant cinq ans, le JWT emporte avec lui assez d’ergols pour maintenir son orbite autour du point de Lagrange pendant au moins 10 ans. Après de longues années de retard et de nombreux dépassements de budget, le télescope devrait finalement s’envoler le 31 octobre prochain. En attendant la mise en service de l’Extremely Large Telescope (ELT), le James-Webb pourra observer les étoiles nées après le big bang pour étudier la formation des premières galaxies et y rechercher de nouvelles exoplanètes capables d’abriter une vie extraterrestre.

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Pierre-Henri Le Besnerais

Sur cette photo, la nébuleuse NGC 2174 vue par le télescope Hubble dans le spectre visible (gauche) et dans l'infrarouge (droite). L'infrarouge permet de détecter de nombreuses étoiles en pénétrant la poussière et les gaz.
Image de synthèse de la montagne Cerro Amazones et du désert chilien. Situé près de l'observatoire Paranal de l'ESO, le site exceptionnel accueillera le futur télescope européen (E-ELT) et son miroir de 39 mètres de diamètre. Ici, le rendu de l'artiste montre à quoi ressemblera le télescope sur la montagne lorsqu'il sera terminé en 2024. ©ESO